Annie Oakley, tireuse d’élite et vedette d’un Far West éteint

David

« Visez le haut du panier et vous l’atteindrez […] Non, pas la première fois, pas la deuxième fois, et peut-être pas la troisième. Mais continuez à viser et à tirer, car seule la pratique vous permettra de vous perfectionner. Finalement, vous parviendrez à atteindre le centre de la cible du succès. »

Annie Oakley

Propos rapportés par le National Geographic

Si aujourd’hui Annie Oakley ne dit presque plus rien au grand public, elle a pourtant été en son temps un phénomène international, sillonnant toute l’Amérique et ce jusqu’en Europe auprès des grands de ce monde. Partie de rien, la “Little Sure Shot” (surnom donné par le chef indien Sitting Bull) était connue pour sa dextérité à l’arme à feu, notamment avec un fusil de chasse Winchester modèle 1873. A contrario, loin de la lumière du spectacle et du divertissement, Annie était aussi engagée dans une oeuvre philanthropique pour les malades, les orphelins ainsi que par la condition féminine, dans l’espoir d’aider les jeunes femmes à faire des études supérieures.

Mais qui est cette Annie Oakley ? Une tireuse d’élite qui, dit-on, a arrêté une horde de bandits abordant un train, s’arrachant des griffes de la mort contre un loup, abattant des ours et autres panthères. Eh bien, tout cela a été imaginé dans un roman inspiré de sa vie, publié en 1887 sous le titre de “The Rifle Queen”. La vraie Annie a commencé son existence loin du fracas des planches, des applaudissements du public, dans un monde de pauvreté et rugueux propre à tout bon Far West.

Née Phoebe Ann Moses en 1860 dans l’Ohio, le destin d’une miséreuse se profilait dans l’horizon fermé d’Annie. Après le décès de son père à l’âge de 5 ans, elle doit subvenir tant bien que mal aux besoins de sa famille. 

Débrouillarde, elle crée des pièges pour attraper le gibier et, de fil en anguille, se sert du fusil de son défunt père. On ne sait pas quand ni comment exactement Annie a su servir d’une arme à feu avec une telle dextérité. Dans la biographie de Sue Macy, Bull’s-Eye: A Photobiography of Annie Oakley, des fragments indiquent, presque nonchalement, qu’elle ignore d’où vient cette compétence. « Je suppose que je suis née avec », a-t-elle dit.

Pour ajouter au malheur, le beau-père d’Annie meurt subitement en 1870, si bien que sa mère n’a d’autre choix que d’envoyer certains de ses enfants chez des voisins, des fermiers du comté rural de Darke dans son cas. Au sein de ce nouveau foyer, elle devait avoir l’opportunité d’aller à l’école et de continuer la chasse, mais dans les faits, rien ne s’est passé comme elle l’escomptait.

Placée à l’âge de 10 ans, une famille cruelle aux allures de Thénardier la maltraitait et ne lui laissait aucun loisir. Annie finit par s’enfuir et retrouve sa mère, désemparée. Bien décidée à prendre son destin en main, elle chasse alors dans les bois voisins et vend la viande au marché, à l’épicerie et aux hôtels, ce qui lui permettra de rembourser l’hypothèque de la maison familiale.

Little Sure Shot

Son talent pour la maniement d’une arme à feu se fait vite remarquer. Elle participera à un match de tir avec un champion itinérant le jour de Thanksgiving, Frank E. Butler, en 1875. À la grande surprise de Butler, la jeune fille de 15 ans seulement le bat dans la compétition. Butler tombe tout de suite amoureux d’elle et ils se marient l’année suivante.

Le couple décide désormais de voyager à travers les États-Unis avec le spectacle. Le “Wild West Show” est créé en 1883 par William F. Cody, alias Buffalo Bill. Ce spectacle grandiose en plein air représente un Far West imaginaire. Il met en scène des reconstitutions de cow-boys combattant des Indiens, des expositions de tir et des performances telles que de l’équitation. Plus tard, Cody abandonne publiquement certaines représentations négatives des Amérindiens dans son spectacle.

Elle rejoint le Wild West Show de Buffalo Bill en 1885 et gagne sa place dans la troupe en frappant tous les pigeons d’argile lancés en l’air par son mari lors d’un exercice de tir.

Au cours des années suivantes, Frank part en tournée avec un partenaire masculin, réalisant des prouesses de tir sur scène. Mais lorsque son partenaire tombe malade le 1er mai 1882, Annie le remplace et remporte immédiatement les honneurs pour ses talents de tireuse.

Saltimbanque et philanthrope

De petite taille, elle acquiert une renommée internationale lors du Jubilé d’or de la reine Victoria à Londres, pour lequel elle sera l’invitée. Annie Oakley et Frank Butler deviennent des stars internationales en donnant des expositions privées à la royauté européenne. Oakley impressionne le public par sa précision, sa rapidité et sa dextérité, notamment lorsqu’elle tire sur une cigarette que le kaiser allemand Guillaume II tient entre ses doigts, loin de sa bouche, cependant.

Le couple rejoint à nouveau le Wild West Show en 1889, mais Oakley est blessée dans un accident de train en 1901. Ils quittent alors la troupe, mais Oakley continue à donner des expositions jusqu’à sa retraite officielle à l’âge de 53 ans.

 

Derrière l’image quelque peu frivole de son spectacle, Annie Oakley va s’investir durablement dans une oeuvre philanthropique d’importance auprès des personnes en difficulté, souffrant de tuberculose, mais également des orphelins, dont elle connait que trop bien les affres. En outre, elle va permettre aux femmes de s’exercer au tir, comme elle, en enseignant les rudiments du genre avec des cours gratuits auprès de 15 000 femmes.

Témérairement, elle enverra une lettre au président des États-Unis William McKinley en 1898 pour organiser un régiment de tireuses d’élite au cours de la guerre hispano-américaine, et en 1917, une proposition de former une division féminine, cette fois-ci au secrétaire de la Guerre. Dans les deux cas, ses efforts resteront lettre morte.

Derrière ces efforts notables de sortir du lot, des ragots et rumeurs émailleront sa carrière concernant son état de santé ou une vie dissolue. Des procès pour diffamation qui feront tout de même une fortune, en guise de dédommagement. Elle meurt à 66 ans à Greenville, dans l’Ohio, non sans avoir éveillé une curiosité répétée et un legs pour le moins estimable.

Biographies et références :

 

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