Le souffle de Juillet avait attiédi les glaciers du Spitzberg, et arraché à la baie de la Madelaine, comme des lambeaux de continent, les glaces accumulées par neuf mois d’hiver.
Pareilles à des îles flottantes qui, pour rivage, auraient eu des montagnes de cristal, ces glaces couvraient au loin la mer, éblouissantes dans leurs splendeurs immaculées. Sous la réverbération du soleil oblique, leurs masses, à demi submergées, ressemblaient à des rochers de pierres précieuses, où toutes les nuances délicates et vives s’unissaient sans se confondre, dans le plus radieux éclat. (p.382)
Tandis que le flot minait leurs bases attendries par la chaleur, plus intense à mesure qu’elles dérivent vers le sud, ces grandes masses changeaient à chaque instant de formes et d’apparences, et variaient incessamment les styles de leur croulante architecture ; les aiguilles, les colonnes, les pyramides, les frontons gigantesques, les arcades colossales, apparaissaient un moment et retombaient bientôt dans l’abîme.
Toute hérissée de leurs débris aigus, la mer les pressait les uns contre les autres et les poussait au rivage, où ils se brisaient avec un fracas de tonnerre, suivi de mugissements rauques.
C’était là un terrible mais sublime spectacle. (p. 382)
Biard François Auguste (1798-1882). Versailles, châteaux de Versailles et de Trianon. MV5183.
Rien dans notre Europe ne saurait donner une idée juste et vraie de l’aridité et de la désolation de ces paysages du Nord, dont les lignes brusques, violentes, durement arrêtées, n’ont pas même, pour adoucir la redoutable sévérité de leurs aspects, cette abondante et sereine lumière qui, sous d’autres latitudes, compense, à force d’éclat, la rudesse et l’aspérité des formes. (p.324)
Tantôt ces îles sont isolées comme des écueils au milieu des flots ; tantôt elles sont si rapprochées et tellement serrées les unes contre les autres qu’elles forment comme un second rivage en face du premier ; tantôt la barque pénètre dans une enceinte de rochers qui s’arrondissent autour d’elles comme le bassin d’un part en pleine mer ; tantôt ce sont de longues murailles, parallèles à leur bases, surplombantes à leur cime, et qui se rejoignent sur vos têtes comme des arcs de triomphe gigantesques. (p.324)
Biard François Auguste (1798-1882). Bayeux, musée d’art et d’histoire Baron-Gérard (MAHB). P0045.
Sur des barques de pêcheurs, il allait d’une île à l’autre, écrivant, dessinant, travaillant toujours. […] Il se rencontre parfois, en effet, chez les Lapons des matelots intrépides, qui font la navigation des côtes ; dignes rivaux de ces rois de la mer qui découvrirent le nouveau monde, avec leurs esquifs sans pont et sans boussole, quatre siècles avant l’immortel Génois. Avec de misérables barques, dont nous ne voudrions pas pour naviguer sur nos lacs, ils effleurent jour et nuit les plus redoutables écueils, et affrontent les plus terribles tempêtes. (p.326)
Malgré son grand âge, il organisait des chasses à l’ours, auxquelles il conduisait les jeunes gens, et dirigeait encore ses nombreuses pêcheries qui lui rapportaient d’assez beaux bénéficies, quand les marchands finnois arrivaient dans ses parages avec leurs provisions de farines et de liqueurs fermentées. (p.53)
Ces tentes n’avaient ni les dimensions ni la richesse de celles que le voyageur rencontre parfois dans les déserts de sable de l’Orient : elles étaient petites, simples de forme, de couleur terne. On voyait bien qu’elles n’avaient exigé ni beaucoup de matériaux ni beaucoup d’art. On n’avait eu besoin pour leur construction que de sept ou huit perches plantées en cercle, réunies en faisceau par leur extrémité, et retenues ensemble par des liens de cuir tordu et des chevilles, qui servaient en même temps à rattacher les draperies de la tente. (p.6)